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lundi, 3ème semaine du temps ordinaire

Entre deux interventions de sa famille pour s’opposer à sa mission, Marc intercale ici une altercation de Jésus avec les pharisiens. Ces derniers descendent de Jérusalem en Galilée. Jérusalem, chez Marc, est le lieu où Jésus va souffrir et mourir à cause des autorités religieuses juives. La Galilée représente le terrain de sa mission, le cadre où il enseigne et opère des guérisons, la porte ouverte au monde des païens. Ainsi, la situation géographique de cette scène présente les scribes comme s’opposant à la mission universelle de salut du Nazaréen.

Regardons en quoi consiste cette opposition. La famille de Jésus s’opposait à son action en lui reprochant d’avoir perdu le sens. L’accusation que formulent ici les scribes est beaucoup plus grave. Elle est double. Tout d’abord, ils accusent Jésus d’être possédé : « Il est possédé par Béelzéboul », ensuite, de chasser les démons par le Prince des démons. Ce n’est pas la même chose. Un possédé n’est pas un exorciste. Néanmoins, les deux accusations peuvent devenir synonymes si le démon qui habite Jésus, a fortiori s’il s’agit de Satan le chef suprême des démons, expulse lui-même ses congénères.

Jésus réagit en convoquant les scribes auprès de lui. Ils sont donc loin de lui. Ils ne le connaissent pas vraiment. Il y a ici un retournement dans l’altercation. En « appelant [les scribes] auprès de lui », d’accusé, subissant un procès, Jésus prend l’initiative dans la discussion. Utilisant alors pour la première fois chez Marc le genre parabolique, Jésus va essayer d’« amener » les scribes jusqu’à découvrir le mystère de sa personne.

La parabole de Jésus se partage en deux. La première image évoque un royaume et une famille divisés. La conclusion qu’en tire Jésus est imparable. Si Satan se dresse contre lui-même c’est le glas qui sonne pour lui. « C’en est fini de lui ». Or les scribes savent bien que ce n’est pas le cas puisqu’ils enseignent à se garder de lui. Jésus peut maintenant exposer les implications de cette déduction en une seconde image : « personne ne peut entrer dans la maison d’un homme fort et piller ses biens s’il ne l’a d’abord ligoté ». Qui est l’homme fort ? Si ce n’est Satan. Qui est celui qui entre dans la maison pour le ligoter ? Si ce n’est le Messie. Quelle est la maison ? Si ce n’est le cœur des scribes.

Cette parabole ne démasque-t-elle pas l’aliénation qui habite chacun de nous ? L’homme fort que chacun croit être ne se trouve-t-il pas ici maîtrisé par un plus fort que lui, Jésus en personne ? Reste à s’interroger sur les liens utilisés par ce dernier. La réponse nous est donnée dans la dernière prise de parole de Jésus : « Dieu pardonnera tout aux enfants des hommes, tous les péchés et tous les blasphèmes ». Ces liens sont ceux de la miséricorde. Ainsi au travers de cette parabole, en montrant aux scribes et à nous-mêmes l’aliénation qui nous habite, Jésus nous révèle qu’il peut et qu’il veut nous en libérer. Il nous reste cependant à accueillir ce pardon qui nous libère.

S’éclaire alors, dans le contexte parabolique de cette péricope, le sens du « péché contre l’Esprit Saint ». Le présupposé des scribes était que l’exorciste agissait par la puissance de celui qui l’habite. Par conséquent, dire de Jésus qu’il est possédé par Satan revient à attribuer au démon ce qui est l’œuvre de l’Esprit Saint qui, selon le témoignage de Jean, repose sur Jésus. N’est-ce pas alors se refuser à la lumière de la grâce divine et au pardon qui en découle ? Comment pouvoir être pardonné si je refuse le pardon. Devant qui refuse la lumière ou s’imagine ne pas avoir besoin de pardon, Jésus demeure impuissant.

« Seigneur merci pour le don gratuit de ta miséricorde. Fais nous la grâce de nous préserver de nous prendre pour ces « hommes forts » qui, se suffisant à eux-mêmes, n’en ressentiraient pas la nécessité. »