Catholique.org - Questions essentielles

Saint François de Sales, évêque et docteur de l’Église

Saint Marc avait déjà évoqué à plusieurs reprises le caractère étouffant de l’euphorie populaire. Pressé de toutes parts, Jésus enjoint à ses disciples « de tenir une barque à sa disposition pour qu’il ne soit pas écrasé par la foule » (Mc 3, 9). C’est depuis cette chaire improvisée que Notre-Seigneur s’adresse à ses auditeurs rassemblés sur la grève. Devant leur fébrilité, il les invite à réfléchir sur la qualité de leur écoute. La parabole est en effet introduite par un vigoureux appel : « Ecoutez ! » et se conclut par une exhortation tout aussi impérative : « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! » C’est dire l’importance de cet enseignement, donné sous forme d’un récit tiré de la vie quotidienne, mais qui évoque notre attitude face à la Parole de Jésus. Tout porte à croire en effet que ce semeur, « sorti pour semer », n’est autre que lui ; ne disait-il pas à ses disciples qui le cherchaient aux alentours de Capharnaüm : « Partons dans les villages voisins afin que là aussi je proclame la Bonne Nouvelle ; car c’est pour cela que je suis sorti » (Mc 1, 38) ?
Et que sème-t-il ce semeur ? Jésus ne le précise pas ; il nous faut attendre l’interprétation de la parabole que Notre-Seigneur réserve aux « compagnons ainsi qu’aux Douze », pour découvrir qu’il s’agit de « la Parole ». Pour le moment, toute l’attention se porte plutôt sur les conditions d’accueil de cette mystérieuse semence. Trois « terres » sont ingrates et demeurent stériles, trois autres sont « bonnes » et portent du fruit « trente, soixante et cent pour un ». Nous avons deviné que la « terre » représente le cœur de l’homme, destinataire de la Parole, en qui elle est appelée à donner son fruit. Cette interprétation est confirmée par Jésus lui-même, qui dans son explication, rapproche, voire identifie les destinataires de la Parole et l’endroit où la semence est jetée en terre : « ceux qui sont au bord du chemin où la Parole est semée » ; « ceux qui ont reçu la Parole dans les endroits pierreux » ; « ceux qui ont reçu la Parole dans les ronces » et enfin « ceux qui ont reçu la Parole dans la bonne terre ». L’auditeur de la Parole est ainsi mis en situation de responsabilité par rapport à l’accueil qu’il réserve à l’enseignement de Jésus. Pour garder la nuance topologique que Notre-Seigneur donne à son interprétation, nous pourrions dire que chacun est responsable du choix du lieu où il se tient pour écouter la Parole.
S’il ne quitte pas le chemin balisé de sa vie quotidienne pour se risquer en plein champ, s’il n’écoute que d’une oreille distraite, les « info’s » en tous genres auront tôt fait de noyer la Parole dans leur flot de bavardage. L’homme qui reçoit la Parole dans un cœur sec, refermé sur lui-même, soucieux de son seul bien-être, celui-là ne tiendra pas dans l’épreuve : « la détresse et la persécution » auront raison de sa fidélité. Quant à celui qui entend la Parole, mais ne préserve pas la flamme qu’elle a allumée en son cœur, celui qui ne se retire pas dans sa chambre intérieure pour l’écouter et répondre à son appel, cet homme non plus ne portera pas de fruit, car le vent de ses préoccupations mondaines aura tôt fait d’éteindre le feu de l’Esprit et d’étouffer la voix du Seigneur. Seuls ceux qui « entendent la Parole et l’accueillent » dans une bonne terre, c’est-à-dire une terre désherbée des désirs mondains ; une terre travaillée par la charrue de l’épreuve ; une terre ameublie par la herse de la patience ; seuls ceux dont le cœur offre à la Parole une telle disponibilité, porteront du fruit, et ils le feront dans des proportions inespérées : « trente, soixante, cent pour un ».

« Père, je suis loin de satisfaire aux conditions de la fécondité de ta semence divine. Pourtant j’ose m’approcher de toi ; non pas pour t’offrir mon pauvre cœur encombré de mille désirs et préoccupations, mon cœur dur et refermé ; mais le Cœur Eucharistique de ton Fils Jésus-Christ. “Par son sacrifice unique, n’a-t-il pas mené pour toujours à leur perfection ceux qui reçoivent de lui la sainteté” (1ère lect.) ? Aussi je fais appel à ta promesse : purifie mon cœur de pierre dans le Sang de l’Agneau ; donne-moi selon ta Parole un cœur de chair, mets en moi ton Esprit : alors je suivrai tes lois, j’observerai fidèlement tes commandements (cf. Ez 36, 27) et je porterai du fruit “trente, soixante, cent pour un” ».