François Xavier fut un des premiers compagnons de la société de Jésus fondée par Ignace de Loyola en 1534.
Un itinéraire vers le Christ
Xavier est le nom du château des ancêtres de St François. Au début du 16e siècle, la Navarre est indépendante. Le père de François est docteur en droit au service du roi Jean d’Albret. En 1512, la Castille envahit la Navarre. Toutes les forteresses sont démantelées. François-Xavier, né en 1506, a 10 ans quand il voit les soldats détruire la demeure familiale. A un fils de famille ruiné, il reste encore une possibilité d’avenir, la carrière ecclésiastique. En 1525, François part pour Paris, et se retrouve au collège Ste-Barbe, où il partage sa chambre avec un jeune savoyard, Pierre Favre.
En 1530, les deux amis sont reçus maîtres ès Arts, et s’inscrivent en théologie. François s’amuse, Pierre Favre étudie. Ils partagent leur chambre avec un nouveau venu, Ignace de Loyola, un étudiant de 38 ans, d’abord distant et moqueur. François-Xavier se lie d’amitié avec Ignace, et se tourne vers Dieu. Ils parlent de l’amour du Christ, et souhaitent se dévouer aux pauvres. Le 15 août 1534, à Montmartre, ils font vœu de pèlerinage à Jérusalem et d’obéissance au Pape : la Compagnie de Jésus est née.
Le pèlerinage à Jérusalem se révèle impossible à cause de la guerre entre Venise et les Turcs. Les compagnons se regroupent donc à Rome et sont reçus par le Pape en novembre 1540. Déjà, on demande ces prêtres de tous côtés, aux Indes Espagnoles, aux Indes portugaises, en Italie du Nord. François-Xavier part pour les Indes, à la demande de Jean III de Portugal, en avril 1541.
Le 6 mai 1542, le bateau transportant François aborde à Goa. Il passe 2 ans sur la côte des Paravers, au sud de l’Inde, parmi les pêcheurs de perles, puis est appelé aux Moluques. Il revient à Goa, part au Japon. En 1552, il espère gagner la Chine mais il meurt à Sancian, à 10 km des côtes chinoises, le 3 décembre (à 46 ans). Il est canonisé en 1622 en même temps qu’Ignace de Loyola.
Une conversion qui porte des fruits
Ayant fait vœu de pauvreté, Ignace et ses compagnons vivaient à la perfection cette vertu. En route pour Rome, ils ne faisaient aucune provision et se contentaient de la nourriture suffisant au moment présent. Les Compagnons, rassemblés à Rome pour peu de temps, méditent sur les épreuves qu’ils viennent de subir. Parcourir les routes trempe le caractère, mais leur existence doit-elle consister en cela ? Dans le résumé des Constitutions futures de leur petite société, qu’ils présentent à Paul III dès le mois d’août 1539, ils font allusion à leurs récentes expériences. Puisqu’ils ont été eux-mêmes exercés dans ces sortes d’expériments, nul ne sera admis dans leur association, sinon après une longue et soigneuse épreuve.
François-Xavier, en route pour l’Orient, reste présent aux pauvres et aux malades. Son idéal est de vivre comme « un pauvre prêtre du pays ». Malgré son mandat papal et son caractère européen, Xavier demeure pour tout apôtre un modèle d’adaptation : il faut suivre les coutumes du pays, si pénible cela soit-il, afin de ne pas surprendre, ni surtout scandaliser, afin d’être plus près de ceux qu’on aime. Eviter le scandale, c’est ne pas faire de Jésus-Christ en sa propre personne une pierre d’achoppement à la foi naissante d’autrui : mieux vaut réussir deux fois moins sans scandale qu’autrement, pour se faire aimer, et faire aimer le Christ.
Un de ses compagnons écrivait : « Maître François nous a recommandé de travailler à nous faire aimer des gens, car de cette façon nous ferons du fruit. Autant en raison de cette recommandation que parce que en soi la chose est nécessaire, nous avons soin d’agir de telle sorte que les gens soient bien avec nous. Là-dessus nous éprouvons une grande consolation en voyant que les chrétiens du pays nous aiment énormément ; il s’ensuit qu’ils donnent crédit à nos paroles et font ce que nous leur recommandons. Cet amour, nous sentons que ce ne sont pas seulement les chrétiens qui nous le portent, mais aussi les païens et, pour autant qu’il paraît de l’extérieur, les musulmans ».
Action et contemplation
Mystique actif, François-Xavier travaillait le jour, priait la nuit, et dormait quelques heures. François Xavier parle beaucoup de ses activités et peu de sa vie intérieure. Cependant, en lisant les conseils qu’il donne à ses correspondants, nous pouvons nous assurer qu’il avait une vie intérieure intense. De jour, il appartenait tout entier au prochain ; de nuit, il appartenait tout à Dieu. En cela, il fut véritablement un imitateur du Christ qui, prêchant le jour, passait la nuit en prière.
Ce bienfait indispensable de la prière, les lumières accordées dans l’oraison, François-Xavier recommande de les noter par écrit : « Par-dessus tout, notez et consignez par écrit ce que Dieu notre Seigneur vous donnera particulièrement à sentir : là se trouve le germe de l’avancement spirituel ». Le mot sentir, que François-Xavier affectionne, requiert une explication : hérité d’Ignace, il désigne une connaissance devenue évidence, une expérience de connaissance concrète : « Ce n’est pas l’abondance de savoir qui rassasie l’âme et la satisfait, mais de sentir et de goûter les choses intérieurement ». Cette expérience ne peut se réduire ni à un pur sentiment - une sensibilité - ni à une pure connaissance, mais se rapproche d’une opération émanant non pas de la seule intelligence, mais de l’être entier ; une rencontre personnelle. L’apôtre va donc puiser au secret de la nuit la lumière dont il a besoin pour se décider, et goûter la paix, la satisfaction, la certitude d’être à sa place, de vivre comme vrai compagnon du Christ, à son pas.
Tiré de Saint François Xavier, Itinéraire mystique de l’apôtre, par Xavier LEON-DUFOUR, collection Christus n° 86, 1997.