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 - 15 avril 2024 - Saint Paterne
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Analyses

La science peut-elle prouver que nous ne sommes pas libres ?

Un cerveau sans esprit ?

Vous croyez que nous agissons librement, que nous sommes responsables de nos actes, et que nous faisons des choix ? Vous parlez encore de l’âme ? Votre expérience vous dit qu’il y a un « je » auto-conscient qui dirige les processus mentaux ? Et bien vous n’êtes pas au courant des dernières découvertes sur le cerveau, selon le « cover story » de la revue Time (12-02-2007).

Il s’agit toujours du vieux problème de la relation entre esprit et cerveau. La nouveauté est le point de vue tellement réductionniste avec lequel le sujet est abordé.
Pour Steven Pinker, professeur de psychologie à Harvard, et pour d’autres auteurs invités, nos pensées, sensations, joies et peines consistent entièrement en l’activité physiologique des tissus cérébraux. Colin McGinn ne saurait le dire plus clairement : « la conscience est un produit biologique naturel, aussi dépourvu d’esprit que la digestion et la circulation du sang ».

Ce qui est frappant, c’est que tout au long de l’article, il est reconnu que nous ignorons beaucoup plus de choses sur le cerveau que nous n’en connaissons. Pour Pinker, ce qu’il appelle le Hard Problem, (expliquer comment l’expérience subjective provient des signaux électroniques neuronaux), reste encore un mystère. Mais quelle que soit la solution, « peu de scientifiques doutent du fait que la conscience se trouve dans l’activité cérébrale ». Je ne sais pas s’ils sont peu nombreux, mais en tous cas ils le sont dans ce reportage, puisque pas même un scientifique qui ne réduise pas le mental et le subjectif à de simples processus de physiologie neuronale n’a été invité.
L’article s’appelle « The mystery of consciousness », mais les conclusions semblent apodictiques. Il n’y a pas de place pour l’esprit. Mais quand, de nos connaissances tellement fragmentées sur le cerveau, on tire des conclusions aussi rigides, on peut soupçonner que les trous se comblent d’idéologies.

Derrière cette façon de voir le problème se trouve une supposition idéologique : l’homme serait un produit plus sophistiqué de l’évolution biologique, mais un produit matériel en fin de compte. C’est seulement une question de volumes de registres. Michael Gazzaniga - directeur du centre d’étude de l’esprit de l’université de Californie - compare la conscience avec un organe à tubes : « ce qui fait que la conscience humaine soit tellement vibrante, est que l’organe de tubes humain a beaucoup de mélodies à jouer, alors que celui de la souris n’en a que peu. » Et dire qu’il y en avait déjà à qui cela gênait de partager les 99% de l’ADN avec le chimpanzé !

Curieusement, pour une science qui est fière de se dire expérimentale, nous ne pouvons pas nous fier à notre propre expérience. « Le sentiment intuitif que tous nous avons qu’il y ait un « je » qui dirige le poste de contrôle de notre cerveau, examinant les écrans de nos sens et enfonçant les boutons de nos muscles, est une illusion », affirme Pinker. « La conscience se trouve être un mélange d’évènements distribués par le cerveau. Ces évènements se disputent notre attention, et quand un processus en éclipse d’autres, le cerveau rationalise le résultat a posteriori et donne l’impression qu’un je s’est chargé de tout ». Par ce même « je » Pinker signe l’article, comme s’il s’était chargé de tout le processus, en un exercice illusoire fait en tant qu’auteur.

Comme si cela ne faisait rien

Les « preuves » exposées tout au long de l’article se basent sur les techniques de neuro-image, qui montrent ce qui s’active ou se désactive dans l’encéphale avant les tâches cognitives complexes. Mais une chose est que les phénomènes psychiques aient un lien avec les neurones, une autre chose est que les processus physiologiques cérébraux suffisent à expliquer l’auto-conscience, l’intentionnalité ou la connaissance.

L’idée selon laquelle l’union de l’esprit et de la matière en la personne constitue une unique nature est parfaitement compatible avec ces changements (échanges) dans le cerveau que détecte la neuro-image. Mais réduire tout le psychisme à l’activité neuronale n’est pas simplement dû à une explication scientifique, mais à une opinion philosophique préalable, qui rejette tout ce qui ne peut pas se réduire à une étude expérimentale.
Mais le plus frappant chez des auteurs comme Pinker est que, après avoir fait des affirmations qui, si elles étaient vraies, remettraient en question le Droit Pénal jusqu’à la solidarité familiale, il termine comme si cela n’avait aucune importance.

Premièrement il nous met au bord de l’abîme du manque de sens de la vie humaine : « pour beaucoup de non-scientifiques, ceci est une perspective terrible. Non seulement elle noie notre espérance de survivre après la mort de nos corps, mais elle détruit la notion d’êtres libres et responsables de nos décisions ».

Mais pas de panique : « la biologie de la conscience offre une base plus solide pour la moralité qui est un improbable dogme d’une âme immortelle ». Pourquoi ? « parce que la biologie de la conscience peut nous obliger à reconnaître les intérêts des autres êtres, ce qui est au centre de la moralité. La capacité de nier que les autres aient des sentiments n’est pas seulement un exercice académique, mais un vice très courant, comme nous pouvons le voir dans l’histoire de la cruauté humaine. Une fois reconnu le fait que notre conscience est un produit de notre cerveau et que les autres ont des cerveaux comme le nôtre, une négation de la capacité des autres d’avoir des sentiments se révèle absurde. Le fait indéniable que nous ayons tous le même tissu neuronal rend impossible le fait de nier notre commune capacité à souffrir. »

Mais Hitler n’a pas persécuté les juifs parce qu’il ne croyait pas en leur capacité à souffrir, mais précisément parce qu’il y croyait. Nous ne sommes pas cruels parce que nous ignorons les sentiments ou les intérêts des autres, nous le sommes quand nous voulons que nos propres intérêts prévalent sur ceux des autres. Et il ne semble pas que nos connaissances de neurologie impliquent par elles-mêmes une plus grande sagesse éthique.

Finalement, Pinker a recourt au vieux cliché selon lequel croire en la vie future détruirait la vie terrestre : « il suffit de se rappeler les personnes tellement célèbres qui, ces dernières années, agirent en espérant une récompense dans l’au-delà : les conspirateurs qui ont pris les avions du 11 septembre. » Et bien ! les neurones de Pinker savent aussi faire des pièges ! Pourquoi ne pas se rappeler les pompiers qui ont donné leur vie pour sauver ceux qui étaient en danger dans les Tours Jumelles ? Quelque mécanisme de la biologie évolutive expliquerait-il leur héroïsme ? N’espéraient-ils peut-être pas une récompense dans l’au-delà ? Le manuel d’instructions de ces scientifiques du cerveau n’a pas grand chose à dire sur cela.

Ignacio Aréchaga.



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