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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Mission

Les grandes étapes de l’évangélisation

L’évangélisation -comme la sainteté à laquelle elle conduit- est un travail de longue haleine : ce travail commence sur soi-même avant de rayonner sur les autres et il est surtout le fruit durable de communautés ecclésiales vivantes, unies et missionnaires, avant de devenir par osmose, l’œuvre de toute l’Eglise au fil des siècles.

L’Eglise du Christ, parce qu’elle est faite d’hommes, a continuellement besoin de se réformer pour être fidèle à sa mission. C’est pourquoi, à chaque époque de renouveau, l’Esprit Saint suscite des maîtres et des témoins qui entraînent l’Eglise sur le chemin d’une « nouvelle évangélisation » ; celle-ci revêt alors des aspects différents selon les époques, les lieux et les cultures. Il s’agit toujours avec les force de l’Esprit Saint, de témoigner et d’annoncer le Christ. Si nous observons les nouveautés de l’Histoire, nous pouvons distinguer dans le flux et le reflux de la montée du christianisme des vagues de plus forte amplitude qui peuvent servir de repères. Pour chaque étape, nous mettrons en relief une figure particulièrement significative.

Une Bonne Nouvelle transmise de personne à personne

A partir de l’Eglise de Jérusalem - issue de la Pentecôte et consciente de sa nouveauté par rapport à la communauté juive où elle est née- la première évangélisation s’est développée dans les pays du Proche-Orient et du pourtour méditerranéen jusqu’en Mésopotamie et en Arménie à l’Est, et aux Iles Britanniques à l’Ouest. Cette époque est marquée par la persécution de la part des autorités juives et du pouvoir romain. Pierre et les apôtres, Philippe et de nombreux chrétiens, Paul après sa conversion, ne ménagent pas leur peine, annonçant à tous la nouvelle extraordinaire et joyeuse de Dieu, venu sur la Terre où il est mort et ressuscité, continuant de vivre au milieu de ses disciples. Cette « bonne nouvelle » attirait beaucoup de personnes qui vivaient l’expérience de la misère et de l’injustice, mais pressentait la grandeur et la bonté du vrai Dieu. C’était, dans le Christ, la découverte du créateur de l’univers, non pas lointain mais proche, parce que fait homme, et la découverte de son dessein sur les hommes, non pas abstrait mais concret et plein d’amour. C’était la révélation de la « folie » de la croix, qui change toute douleur en amour et fait de chaque moment de la vie une étape vers la plénitude du bonheur, en Dieu. C’était la découverte de l’amour réciproque, qui faisait dire aux païens jusque dans l’arène des martyrs : « regardez comme ils s’aiment ».
Si l’évangélisation est surtout le fait de pionniers, comme Paul, tous ont conscience de la mission : la vie exemplaire des premiers chrétiens attirait les contemporains de manière capillaire et silencieuse. La « bonne nouvelle » se transmettait de l’un à l’autre par les parents, les amis, les commerçants, les voyageurs... Lorsqu’en 313 l’empereur Constantin libère l’empire de son carcan païen et reconnaît la liberté de conscience et de culte, il fait droit à une situation de fait : les forces vivent de l’empire sont devenues chrétiennes.

L’esprit chrétien pénètre mentalités et institutions

La période qui s’étend du Vème au Xème siècle marque l’écroulement de la « chrétienté antique », de culture gréco-romaine, et la lente formation de la « chrétienté médiévale », de style « féodal » en Europe. A l’époque brillante des Pères de l’Eglise (IVème siècle) succèdent de longs siècles apparemment obscurs (Vème- Xème siècle). Mais cet « hiver », qui suit le temps des fruits mûrs, porte la sève d’un printemps nouveau. Le « Moyen-Âge » (entre « l’Antiquité » et les « Temps modernes ») commence avec les grandes migrations vers le sud des peuples du nord de l’Europe (Vème et VIème siècle) et se prolonge jusqu’à l’éclosion de l’humanisme de la Renaissance (XIVème et XVème siècle). L’esprit chrétien survit à la chute de l’empire romain d’Occident (476) et pénètre peu à peu les mentalités et les institutions nouvelles, s’efforçant de les modeler selon l’idéal évangélique. L’évangélisation et la civilisation des « barbares » - comme on appelait les peuples nordiques qui avaient envahi l’empire- fut surtout l’œuvre des moines et des papes. Deux grandes figurent dominent cette deuxième grande vague d’évangélisation : Benoît (vers 480 -547) e, fondateur des bénédictains, et Grégoire « le Grand » (540-604), pape. Vers l’âge de 20 ans, Benoît, originaire de Nurcie, en Ombrie, quitte Rome où il est étudiant, pour suivre « son désir de plaire à Dieu seul ». Après une alternance de vie solitaire et de vie commune avec des moines, Benoît émigre avec quelques disciples vers le sud. Ils entreprennent l’évangélisation de la région et construisent le monastère du Mont Cassin que Benoît gouvernera jusqu’à sa mort. L’œuvre de Saint Benoît se poursuivra à travers les siècles grâce à la « Règle », le code de vie qu’il avait rédigé pour ses moines dont « Ora et Labora » (prie et travail) est le mot d’ordre. Les abbayes et monastères couvrent bientôt l’Europe et deviennent des oasis de charité et de paix, des modèles et des écoles de vie sociale dans le bouillonnement des peuples du haut Moyen-Âge.

Renouveau spirituel avec Bernard, François, Dominique

Après une période assombrie par les guerres, les épidémies et la famine (fin IXème -début XIème siècle), l’Europe connaît une paix relative : le commerce se développe, des villes se fondent et s’agrandissent. A côté des chevaliers et des paysans, se développe la classe des bourgeois, marchands et artisans des villes et des bourgs. D’autre part, après la rupture malheureuse du « schisme d’Orient », entre l’Eglise de Rome et celle de Constantinople (1504), une troisième grande vague de renouveau spirituel se prépare avec des saints comme Bernard de Clairvaux qui, en 1112, avec 30 compagnons, entre à l’abbaye de Cîteaux. L’exemple des cisterciens entraîne beaucoup de chrétiens dans le mouvement du renouveau : laïcs, clercs, religieux, membres de la curie romaine. Dans la foulée du VIème concile de Latran (1215), la nouvelle évangélisation voit le jour avec « deux colonnes de l’Eglise » : François avec la pauvreté et Dominique avec la science. Face à l’absolutisme des princes et des évêques, souvent plus seigneurs que pasteurs, face à l’âpreté du gain qui provoquait tant de luttes intestines, beaucoup aspirait à une fraternité plus réelle entre les hommes.

L’incrédulité combattue par l’amour et non la force

Fils d’un riche marchand drapier d’Assise, le jeune François (1182-1226) était épris d’idéal chevaleresque, mais Dieu lui fait comprendre qu’il avait mieux à faire que de se mettre au service d’un seigneur de la terre. L’âme en fête, il se met à parcourir le pays vivant d’aumônes et prêchant le pardon et la fraternité selon le cœur de Dieu. A la différence des « vaudois » (pour qui seules comptaient les Ecritures, sans clergé ni sacrements) et des « cathares » ( qui voyaient le Bien et le Mal absolus se faire la guerre dans le champ clos de l’humanité), novateurs hérétiques qui divisaient la chrétienté, François ne pense pas à réformer l’Eglise mais à ressembler au Christ dans la pauvreté parfaite. Les disciples affluent : bourgeois, artisans, chevaliers, paysans, prêtres. Ainsi naît la famille fransiscaine (1210).
Le « poverello » lance ses frères sur les chemins du monde pour gagner les âmes au Christ : Italie, France, Espagne, Hongrie, Allemagne, Proche-Orient, Egypte, Maroc... Son influence est immense : il est à l’origine d’un nouveau style de vie chrétienne. Donnant la primauté à l’exemple sur la parole, il a rénové l’esprit missionnaire. L’incrédulité doit être combattue par l’amour et non par la force, en prêchant plutôt qu’en luttant : c’est l’abandon du style des croisades et par avance la condamnation de l’Inquisition. Le renouveau se répand dans le peuple grâce au « Tiers Ordre ». formé de milliers de chrétiens, qui ne pouvant entrer au couvent, se groupent en fraternités laïques liées à l’Ordre, pour vivre sa spiritualité et seconder son apostolat. Franciscains et dominicains ont contribué à intérioriser les convictions religieuses des fidèles. L’instruction, jusqu’ alors réservée aux clercs, a progressé dans le peuple de Dieu et permis à un plus grand nombre de laïcs de s’exprimer, y compris sur les questions de la foi.

Premiers humanistes et Réforme

Affaiblie par le » schisme d’Occident », l’Eglise se trouve confrontée au vaste mouvement de la Renaissance (début XVème -fin XVIème siècle), qui accompagne l’accroissement de la population, le développement du commerce et de la finance et les grandes inventions scientifiques et techniques. Le progrès de l’imprimerie favorise la circulation des idées (1440). L’usage de la boussole renouvelle l’art de la navigation et rend possible des grands voyages d’exploration (Christophe Colomb « découvre » l’Amérique en 1422). En 1543, Nicolas Copernic élabore le système héliocentrique (le soleil et non la terre au centre du mouvement des planètes). Les mentalités changent, l’esprit critique se développe. Le Moyen-Âge était centré sur la religion avec une tendance à l’objectivité ; l’époque nouvelle porte son attention sur l’homme dans la subjectivité. Cependant les premiers « humanistes » sont chrétiens : Erasme, Thomas More, Guillaume Budé... comme les grands artistes : Fra Angelico, Raphaël, Michel Ange, Léonard de Vinci... Dans cette fermentation des esprits qui représente la crise de puberté du monde moderne, les responsables de l’Eglise auraient dû se comporter en éducateurs, mettant leur contemporains devant l’idéal évangélique : transformer en rapport de liberté, la subordination de l’homme médiéval au principe d’autorité, travailler à intérioriser la foi dans le cœur des fidèles, au lieu de l’imposer... Malheureusement, ceux qui gouvernaient l’Eglise à ce moment là étaient plus ou moins impliqués dans la crise qu’ils auraient dû guérir. C’est sans aucun doute les causes profondes de l’effritement de l’unité chrétienne avec Luther (en 1521), Calvin (en 1533) et Henri VIII d’Angleterre (en 1583).

Vers les autres continents

Face aux abus et aux scandales qui s’étaient répandus « de la tête aux membres », l’Eglise connaît enfin une vague de réforme, malheureusement tardive, avec le Concile de Trente (1545-1563) et les saints, qui ont été promoteurs de son actualisation : c’est le 4ème grand mouvement de retour au sérieux de l’Evangile. L’évangélisation fait des progrès en Afrique, en Asie du Sud-Ouest (Philippines) et en Amérique Latine avec des missionnaires issus d’ordre religieux anciens et nouveaux. Charles Borromée (1538-1584) est l’âme de la réforme catholique en Europe : cardinal et secrétaire d’Etat à 21 ans, jeune archevêque de Milan, il réalise en sa personne le modèle du pasteur, proposé par le Concile travaillant à redonner aux prêtres le goût de la prière et de l’apostolat, accomplis « avec amour » : « C’est ainsi que nous aurons la force d’engendrer le Christ en nous et chez les autres ». Il fonde plusieurs séminaires, visite régulièrement les paroisses et jette les bases du célèbre « catéchisme » du Concile de Trente. Parmi les nombreux fondateurs de l’époque, Ignace de Loyola (1491-1556), chevalier espagnol, comprend que Dieu le veut à son service. Il fait retraite au monastère de Monserrat, en Catalogne, donne son épée et son cheval aux moines, son bel habit à un mendiant et, simplement vêtu, se rend à Manrèse, une ville des environs, où il soigne les malades de l’hôpital. C’est là qu’il rédige les « Exercices Spirituels », fruit de sa rencontre avec Dieu. En 1528, à Paris où il étudie, se forme le premier noyau de la « Compagnie de Jésus » (les jésuites), approuvée par le pape en 1540. La compagnie donnera des missionnaires magnifiques tels que François-Xavier (1506-1552), l’apôtre de Goa, du Malacca et du Japon ; beaucoup d’entre eux mourront martyrs.

De l’autodéfense au service de la société

Le temps qui sépare le Concile de Trente (XVIème siècle) et le second Concile du Vatican (XXème siècle) correspond à une période où l’Eglise vit en autodéfense. La contestation s’est d’abord attaquée à la structure hiérarchique et sacramentelle, au nom d’une Eglise spirituelle, s’appuyant presque uniquement sur la Parole de Dieu (la justification par la « foi seule ») : ce fût l’essor du protestantisme sous tous ses aspects (XVIème siècle). La critique s’est ensuite attaquée à la Parole de Dieu, c’est-à-dire à la Révélation au nom de la raison. La foi est mise en doute par la raison : c’est le rationalisme du XVIIIème siècle qui triomphe avec la Révolution française (intronisation de la déesse « raison » dans la cathédrale de Paris en 1793). Enfin on nie l’existence même de Dieu au nom d’une conception matérialiste de l’univers : c’est l’athéisme des XIXème et XXème siècles avec Freud, Marx, Nietzsche...
Après la « mort de Dieu », proclamée par les athées, se profile la mort de l’humanité par une apocalypse atomique ! Durant cette période, notre monde a traversé révolutions, guerres civiles et mondiales, génocides, etc... Faces aux besoins immenses de l’humanité, l’Eglise -grâce aux congrégations nouvelles et anciennes- a continué d’éduquer la jeunesse, de secourir les pauvres, de soigner les malades, de prêcher des missions... Si l’Eglise a perdu son influence sur de larges couches sociales, traditionnellement catholiques, la conscience chrétienne s’est affinée et le christianisme a progressé dans le monde (2 milliards de chrétiens dont 1 milliard de catholiques). Les chrétiens « séparés » commencent à se rencontrer et avancent sur le chemin de la réconciliation, grâce au mouvement œcuménique.
Avec la page de l’ouverture du monde moderne et de la première encyclique sociale préparée par des Papes clairvoyants comme Léon XIII (1878-1903), l’Eglise catholique connaît un renouveau spirituel et missionnaire avec le Concile de Vatican II (1962-1965) et les « mouvements ecclésiaux », qui représentent un véritable don de Dieu pour la nouvelle évangélisation et pour l’activité missionnaire (Jean-Paul II Redemptoris Missio). L’Eglise a pris une conscience plus claire de sa nature, réalisé sa réforme (plus de collégialité à tous les niveaux) et entrepris une approche plus juste du monde contemporain.

En dialogue avec le monde

Aujourd’hui, malgré la déchristianisation, la sécularisation et le développement des sectes nous commençons par être portés par la « lame de fond » du retour à Dieu dans notre société. C’est la 5ème grande vague d’une « nouvelle évangélisation » qui ne fait que commencer et qui va s’amplifiant, en raison d’une convergence entre le message de l’Eglise et l’attente de l’humanité. Après avoir vécu en autodéfense, l’Eglise n’a plus peur : elle est entrée en dialogue, tous azimuts avec le monde. Les XXIème siècle laisse espérer qu’il sera celui de grandes découvertes spirituelles au service de la paix et de la fraternité universelle.
La figure de Jean-Paul II est particulièrement remarquable, lui, qui à l’imitation de l’apôtre Paul, parcourt le monde pour affermir les Eglises dans la foi et les entraîner à travailler avec lui à la régénération de l’humanité, invitant tous ses frères, les hommes, à ouvrir les portes au Rédempteur. Grâce à lui, le Pape n’apparaît plus seulement comme le directeur des catholiques , mais comme le défenseur des droits de Dieu et de chaque personne humaine. Comme Grégoire le Grand -avec l’aide des moines- a sauvé l’Eglise et la civilisation du danger des barbares en travaillant à leur évangélisation, de même face aux idéologies modernes qui ont engendré des politiques tyranniques porteuses de tant de souffrances, Jean-paul II, secondé par le clergé, les mouvements et les communautés nouvelles ou renouvelées dans l’esprit du Concile, reporte l’Eglise à sa mission, tout en mettant la base d’un nouvel humanisme. Ce ne sont pas les idéologies mais la foi, qui transforme le monde de manière durable et bénéfique. Les nouvelles générations, stimulées par les « Journées Mondiales de la Jeunesse » se préparent suivant le voeu de Jean-Paul II à faire des diocèses, paroisses, communautés, mouvements et associations, des « lieux et des écoles de communion » pour le monde.

Michel LEMONNIER (dominicain)



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